par julien.demets

FC Nantes, équipe de France : et Dimitri Payet a débarqué à Nantes…

C’est un gamin plein d’énergie mais parfois incontrôlable que le FC Nantes a récupéré au creux de l’hiver 2004.

De la Réunion à la Jonelière, voici l’histoire d’un incroyable destin.

“On s’est bien marré !” En sortant de l’entraînement, Fabien Barthez exulte. Il vient de terminer la séance sur le terrain comme joueur de champ et, accessoirement, s’est offert le mollet de Dimitri Payet sur un tacle appuyé et pas franchement involontaire. De son côté, le Réunionnais n’a pas demandé son reste et a quitté la pelouse en boîtant bas, forcément énervé. Nous sommes en janvier 2007 à la Jonelière. Le “Divin Chauve” a débarqué quelques semaines avant avec la casquette de sauveur dans les cages d’un FC Nantes malade et promis à une chute en Ligue 2 à l’issue de la saison. Et entre les deux hommes, la guerre (d’ego) est déclarée. Au jeune Payet, on reconnaît un talent certain mais sa nonchalance dégage un parfum d’arrogance. Sous les pieds du gardien champion du monde et d’Europe, on a en revanche déroulé le tapis rouge et on accepte toutes les excentricités. Y compris, donc, celle de découper en toute impunité le jeune Payet, à peine 20 ans, coupable de l’avoir agacé par ses gris-gris incessants assimilés à du chambrage…

“Quand il jouait, on avait l’impression qu’il chambrait”

A elle seule, cette scène pourrait ainsi résumer les premiers pas du nouveau prodige de l’équipe de France en métropole. Assurément bon sur le terrain mais avec cette pointe de condescendance qui passe mal dans un univers où on n’aime pas trop ce qui sort du rang. “Il avait de la personnalité, se souvient aujourd’hui l’actuel directeur du centre de formation des Canaris, Samuel Fenillat, son tout premier entraîneur sur les bords de l’Erdre en 18 ans Nationaux (ancêtre des U19). Il s’aimait bien, il avait un certain ego. Il tombait un peu dans la suffisance, mais il a progressé là-dessus, gagnant en maturité. C’était un beau joueur et il le savait mais c’est aussi ce qui fait sa force. Il était sûr de lui, a toujours eu confiance en lui. Ça fait avancer ! Il était tout de même agréable à vivre. Même si, quand il jouait, on avait l’impression qu’il chambrait.”

Il faut dire que le gamin n’a pas vécu une adolescence très commune. Arraché à la douceur de l’océan Indien à 12 ans, il atterrit au centre de formation du Havre en 1999. L’expérience est rude et dure quatre ans avant un retour express sur l’île de la Réunion. A l’Excelsior Saint-Joseph, on récupère un diamant brut qu’il faut savoir polir. Le club de Goulam Gangate se chargera des premières touches mais préférera confier le joyau à l’octuple champion de France. Pourquoi Nantes ? Les hasards de la vie ! Plusieurs années auparavant, l’ancien président du fanion réunionnais avait effectué son service militaire dans la Cité des Ducs où il avait noué des contacts avec le FCN, et notamment l’un de ses dirigeants, René Degenne. Une amitié qui, plus tard, s’est transformée en invitations successives des jeunes pousses de la Maison Jaune à un tournoi annuel pour les benjamins sous les cocotiers. Tout naturellement, lorsque Payet a révélé tout son talent, c’est vers le FCN que l’Excelsior s’est tournée comme le raconte dans ses pages Hosmane Gangate, le tout premier coach de l’intéressé en seniors (voir pages 20-21).

“Il a un coup d’avance”

En décembre 2004, le Réunionnais repose donc le pied en Métropole et intègre dès janvier 2005 l’équipe de Fenillat. “Son premier match, il l’a disputé en Coupe Gambardella à Bourges en janvier sous la neige, rembobine l’entraîneur. On avait perdu aux tirs au but mais, cette saison-là, on a atteint la finale des 18 ans Nationaux et affronté les jeunes de l’Olympique Lyonnais de la génération Benzema et Ben Arfa.” Malgré cette nouvelle défaite, Payet sort du lot et passe directement en réserve, sous les ordres de Stéphane Moreau (aujourd’hui directeur du centre de formation de Laval). Là aussi, l’ascension est rapide puisque dès le mois de décembre suivant, Serge Le Dizet le convoque chez les pros. Pour sa deuxième apparition en L1, le 21 janvier 2006, il claque un but à Metz (victoire du FCN, 4-1), presqu’un an jour pour jour après ce fameux premier match avec le maillot jaune et vert sur les épaules, à Bourges avec les jeunes, sous les flocons. La saison suivante, il ne pourra éviter la relégation du club, lequel ne pourra de son côté le retenir plus longtemps.

A Saint-Etienne, Christophe Galtier le prend sous son aile et poursuit le travail. Le passage à Lille sera ensuite plus laborieux jusqu’à ce que Marcelo Bielsa le récupère à l’OM et l’amène à son niveau actuel, qu’il met au service de West Ham, en Angleterre, et des Bleus de Didier Deschamps. Au final, “sa qualité ne me surprend pas, c’est quelqu’un qui avait déjà un truc en plus à l’époque, reconnaît Fenillat. Il a l’art du contre-pied, la maîtrise de l’espace, il est toujours dans la feinte. Il invente des solutions. C’est un joueur moderne capable de tout faire. Il a tout de suite été positionné côté gauche mais il a la faculté de jouer des deux pieds. Il a toujours le dernier geste juste. Il lit l’espace. Il a un coup d’avance.” En amical ou en match officiel depuis le début du printemps, les gardiens du Cameroun, de la Roumanie, de l’Albanie et de l’Islande peuvent aussi en témoigner.

Charles GUYARD

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Pour résumer

C’est un gamin plein d’énergie mais parfois incontrôlable que le FC Nantes a récupéré au creux de l’hiver 2004. Voici l’histoire d’un incroyable destin.

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