L'ESTAC de Laurent Batlles est déjà passé sous pavillon anglais.
L'ESTAC de Laurent Batlles est déjà passé sous pavillon anglais. Credit Photo - Icon Sport
par Alexandre Corboz
ENQUÊTE BREXIT

PSG, OM, OL, ASSE, FC Nantes – Mercato : comment le Brexit peut transformer le paysage français

En modifiant les règles du marché des transferts, le Brexit aura forcément des répercussions plus ou moins importantes sur le football français. Projection dans le monde d'après.

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Quand on discute avec tous les spécialistes autour de la question du Brexit dans le football, une phrase revient : « Les Anglais sont avant tout des gens pragmatiques ». Que ce soit pour la Fédération ou les politiques locaux, la Premier League est un étendard à protéger et si les règlements sont ainsi fait aujourd'hui, rien ne dit que les conditions du permis de travail ne seront pas assouplies si, à l'usage, les clubs britanniques venaient à manquer deux ou trois gros coups à cause de cette contrainte.

Si la limitation à trois joueurs de moins de 21 ans par club et par Mercato vise à protéger la formation anglaise d'un afflux massif de jeunes footballeurs étrangers, les clubs anglais ne vont pas non plus totalement abandonner à leurs rivaux européens l'extraordinaire vivier français pour autant mais sans doute que d'autres leviers seront activés.

Le vivier français à la merci d'autres pays ?

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Tanguy Kouassi est passé du PSG au Bayern Munich. Symbole d'une ère allemande sur le foot de jeunes ?Credit Photo - Icon Sport

L'une des premières idées qui ressort du « Brexit du foot », c'est la thèse du remplacement des scouts anglais par d'autres pays dans le paysage du football de jeunes. Une vision qui divise. « Certains pensent que les Allemands prendront la place des Anglais. Je n'y crois pas une seule seconde. S'il y a bien un championnat dont les clubs sont rigoureux et pas du genre à faire de folie, c'est bien la Bundesliga », décrypte l'agent de joueur Christophe Mongai, du groupe USM.

Pour beaucoup, comme Bruno Belgodère, délégué général adjoint du syndicat Première Ligue, il est prématuré d'évoquer une redistribution des cartes : « « Peut-être qu'il y aura moins de départ, peut-être le Brexit laissera plus de temps aux jeunes joueurs pour se développer en France. Mais il est aussi possible que les meilleurs continuent à partir vers d'autres marchés (…) Comment vont réagir les autres pays face aux règlementations qui changent en Angleterre ? Il y a des modes. L'Allemagne peut en être une mais c'est encore trop tôt pour lire des tendances ».

De son côté, Olivier Jarosz, Managing Partner chez Club Affairs, une nouvelle mécanique peut néanmoins se créer avec le temps : « Les Espagnols ou les Italiens peuvent être tentés d'offrir des contrats. Jusqu'ici, ils étaient à la masse, dans l'incapacité de suivre sur les offres anglaises. Il se peut aussi que cela profite à l'Allemagne ou à quelques structures autrichiennes sur le modèle de ce que fait le Red Bull Salzbourg. En fermant le marché anglais, on va créer l'appétit dans d'autres clubs et d'autres championnats ».

Le City Group à Troyes, un exemple qui en appelle d'autres

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Manchester City contourne déjà le problème.Credit Photo - Icon Sport

Pour autant, il serait très surprenant d'imaginer que les Anglais rendent les armes aussi facilement. Certains travaillent déjà par le biais de moyens détournés. S'il se peut qu'on assiste à un phénomène de naturalisation précoce comme le Portugal a pu le faire avec les joueurs brésiliens par le passé, l'apparition de « clubs pépinières » est aussi une option. Via son City Group, Manchester City a posé les jalons du projet du côté de l'ESTAC. Un projet qui prendra encore plus de sens quand le club aubois sera revenu dans l'élite.

La direction troyenne avait besoin d'argent et s'est « vendu » à Manchester City, devenant une sorte de centre de formation. Après tout, le football français est vu comme une gigantesque pépinière alors autant assumer. Manchester City – qui a confié la présidence du club à un anglais de sa maison mère (Simon Cliff) - pourra toujours continuer à recruter des joueurs de 12 à 16 ans pour le compte de son satellite français, les faire mûrir jusqu'au plus haut niveau et, pour les meilleurs parvenant à percer dans l'équipe fanion, les récupérer à moindre frais avec un permis de travail clé en main. « Pour l'instant, aucun club à l'exception du City Group et de Red Bull n'ont l'approche d'acheter des clubs pour bâtir un réseau de transferts », explique Olivier Jarosz. Cela pourrait changer si le modèle City Group fonctionne.

Société suisse indépendante, travaillant notamment dans le conseil de clubs de football, le Club Affairs d'Olivier Jarosz avait même imaginé dans l'une de ses premières simulations sur l'impact du Brexit, que la Premier League – qui dispose de sa propre société commerciale - pouvait même en venir... à racheter un club en France par exemple. « Sur le modèle d'un City Football à l'envers, la Premier League pourrait décider d'utiliser cette plate-forme afin de faire passer tous ces mouvements par ce club », explique-t-il. Une manière de régler la question du permis de travail et de pouvoir continuer à travailler sur des profils français de moins de 18 ans. Un modèle qui dépendra en grande partie de la capacité des clubs à s'entendre pour gérer un vivier (système de draft ? Accord de non-sollicitation entre certains clubs ?).

Des accords en one-shot à imaginer ?

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Joel Campbell, prêté par Arsenal à Lorient pour qu'il obtienne un permis de travail.Credit Photo - Icon Sport

A terme, il se peut aussi que certains clubs tirent profit de la difficulté d'obtenir un permis de travail anglais pour se renforcer via des prêts de joueurs compétitifs. On se rappelle notamment du précédant Joël Campbell, ce joueur costaricien prêté par Arsenal au FC Lorient en 2011-12. A l'époque, l'attaquant ne pouvait pas être qualifiable pour la Premier League. Les Gunners avaient alors fait jouer leur bonne entente avec les Merlus pour que Campbell fasse une saison en France avant de rentrer en Angleterre. Ce modèle peut être une nouvelle norme pour des profils moins exotiques mais tout aussi intéressants en Ligue 1.

« Il se peut qu'on assiste à des petits arrangements entre clubs via des agents. Certains clubs anglais pourraient notamment être tenté d'investir quand même sur des joueurs non éligibles au permis de travail avant de les prêter dans la foulé. En France, où les clubs auront besoin de liquidités et de bons joueurs, cela peut être l'occasion de trouver des accords. On s'assure juste que le joueur ciblé joue les minimas de matches pour être éligible au permis de travail. S'il est bon, il rejoint Manchester United. S'il est juste intéressant mais pas encore pour un top club, peut-être que ça plairait à Brighton par exemple. Des logiques vont se mettre en place et être testées », conclut Olivier Jarosz. Des deals tripartites « gagnant-gagnant » comme une solution pour réaliser des Mercato low cost en L1 et permettre aux Anglais de faire tourner leur business en France malgré tout...

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Pour résumer

Avec le Brexit, le marché des transferts va changer. Forcément, il se peut que ces changements structurels aient un impact sur l'avenir du foot français...

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