Deuxième volet de notre long et passionnant entretien avec Fleury Di Nallo. La légende de l’OL nous parle des attaquants d’aujourd’hui, s’enthousiasme pour le dernier phénomène lyonnais Malick Fofana, évoque son record, Alexandre Lacazette et déplore l’absence de footballeurs de rue aujourd’hui en Ligue 1.
But ! Football Club : Fleury, pensez-vous que le temps des attaquants de petite taille est révolu dans le football ?
Fleury Di Nallo : bien sûr que non ! Il n’y a pas si longtemps, Lionel Messi était le meilleur au monde et ce n’était pas un géant par la taille. Je vais aussi prendre l’exemple de l’OL. Fofana n’est pas grand et le meilleur, c’est qui actuellement ? C’est lui ! Déjà il y a 40 ans, on commençait déjà à dire qu’avec l’arrivées des grands attaquants et les succès des Hollandais que les petits pouvaient plus jouer. Aujourd’hui, on recommence à dire ça et pourtant on a l’exemple sous les yeux. Fofana, il est petit non ? Et bah c’est le meilleur ! D’ailleurs, Lacazette n’est pas grand non plus… Avoir des grands défenseurs, c’est normal mais pour les attaquants, il y a toujours une place pour les petits.
Quel regard portez-vous sur les attaquants de Ligue 1 ?
Je trouve que ça a changé et c’est pour ça que Fofana me plait. Il est différent des autres. Il est un peu comme nous avant. C’est aussi pour ça qu’il est aimé à Lyon. Les Lyonnais ont toujours aimé ce genre de profil. On n’a jamais eu de très grands gabarits, à part Nestor (Combin) qui était un peu plus grand. Chiesa, Lacombe, moi… Il y a une culture des petits à Lyon.
On a quand même le sentiment qu’il y a moins de joueurs techniques, de joueurs d’instincts …
C’est vrai ! Le profil a un peu disparu, pourquoi ? Selon moi, ça tient de l’évolution de la société. Les enfants ne jouent plus au foot dans les cours et c’est pourtant la meilleure école qui soit. Il y a deux ans, j’ai fait avec l’OL une interview dans la cour où j’habitais (la Cité des jardins dans le 7ème arrondissement de Lyon, NDLR). Il n’y a plus rien là-bas… A l’époque, dans mon immeuble, on était trois à être allés dans des clubs professionnels. Dans l’immeuble d’à côté, il y en avait deux autres… Dans ma cour, on était cinq joueurs à avoir fait carrière. Maintenant ça n’existe plus ! Pourtant, la cour, c’est toujours la même mais personne ne joue au football…Ils partent tôt en club ou se tournent vers autre chose mais il n’y a plus cette culture de la rue.
« Lacazette ? Il manquera de temps pour me battre »
Alexandre Lacazette est votre dauphin au classement des meilleurs buteurs de l’OL. Êtes-vous surpris de le voir s’approcher de votre record ?
Non mais il a quand même un avantage sur moi : il tire les penaltys. Il en a marqué 30 alors que moi je n’ai jamais tiré un penalty. Si je les avais tiré, je ne serais pas à 222 buts mais à 260… Mais je me pense qu’il manquera de temps pour me battre. Aujourd’hui, il est à combien d’écart (35 buts, NDLR) ? Il est bientôt en fin de contrat, non (cet été, NDLR) ? Je ne vois pas l’OL le garder un an de plus. Il est bientôt libre, il a un salaire énorme. L’Américain n’est pas là pour faire plaisir aux gens. Ce sera quand même compliqué de marquer une quarantaine de buts en quelques mois…
Aujourd’hui, dans toute l’histoire de la Ligue 1, un seul attaquant a fait mieux que vous sous le maillot d’un même club : Kylian Mbappé (256 buts avec le PSG)…
Oui et il jouait où Mbappé ? Lui, il a fait son score en étant dans le meilleur club français de son époque. Moi, j’évoluais dans un OL qui était en dessous de Paris, Saint-Etienne, Marseille, Monaco, Nantes. Dans un Lyon qui était le sixième ou septième club de son époque. Je pense que si à l’époque j’avais joué à Sainté, j’en aurais encore marqué un peu plus… Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’à notre époque, les statistiques n’avaient pas la même importance. On finissait le championnat à plus de 20 buts, on repartait la saison suivante sans se poser la question. Ce chiffre de 222 buts, il m’a été rapporté que bien après ma carrière… Pendant, je n’avais pas conscience de tout ça et si j’avais en tête de faire un record impossible à battre, je ne serais pas parti au Red Star en cours de saison sur un coup de tête.
Lors de votre dernière visite au centre d’entraînement de l’OL, il y a deux ans sous Laurent Blanc, beaucoup de joueurs ne vous connaissaient pas. Cela vous désole cette absence de culture club ?
Oui et non car la plupart n’étaient pas de Lyon. Après, il n’y a plus, chez beaucoup, cet amour du foot qui nous portait nous. Quand j’ai démarré, Ernest Schultz était la référence à Lyon. Il y avait aussi Hjalmarsson, Jensen… Ces gens-là, je m’en rappelle. Les footballeurs de maintenant n’ont plus rien à voir. Ils n’ont plus la même mentalité.
Le foot moderne est-il trop pourri par l’argent selon vous ?
Je m’en suis vraiment rendu compte en étant agent de joueurs il y a quelques années : j’ai été trop déçu avec les joueurs. Ils pensent qu’au pognon… A notre époque, on n’y pensait pas. Il n’y en avait pas (rires) Nous, on pensait à gagner pour aller chercher une prime de matchs de 300 francs. Maintenant les joueurs s’en foutent. Même avec des primes de matchs à 1500€.
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