ASSE - L'oeil de Didier Bigard : « Comment Saliba a-t-il pu échapper aux grands d'Europe ? »

Et évoque son avenir si prometteur.

« Pourquoi Saliba nous a-t-il échappé » s'interrogent les grands d'Europe. Comment un tel joueur (on n'aime pas le terme pépite tellement galvaudé) a-t-il pu se retrouver à l'ASSE ? C'est la question que posent tous les actionnaires des grands clubs européens à leurs recruteurs maison, à leur dizaines de scouts pour les Anglais, à tous leurs réseaux pour les Français. A Paris ou Lyon plus qu'ailleurs sans doute. Comment William Saliba a-t-il pu leur échapper ? C'est la magie du foot, c'est surtout le travail pas toujours assez reconnu effectué à Saint-Etienne.

Un accord de non-sollicitation à 13 ans

« On a fait avec lui comme avec Nordin et Saint-Maximin. Si on veut avoir une chance, on doit repérer les joueurs avant tout le monde. Quand ils sont connus et que les gros parlent de fric, c'est terminé » explique Gérard Fernandez, le responsable du recrutement des jeunes, à l'ASSE, qui s'appuie sur des hommes sûrs pour dénicher les talents de demain, Jean-Claude Anquetil et Ludovic Paradinas pour la région parisienne. J'ai travaillé pendant 16 ans avec Ludo et quand il me dit « il faut qu'on se bouge sur un joueur, crois-moi, je me bouge ».

C'est ce qui a été fait avec Saliba auquel le club stéphanois a fait signer un ARS (accord de non sollicitation) dès ses 13 ans. Il a ensuite pu rester jusqu'en 2016 dans son club, Montfermeil, avec lequel Saint-Etienne a de bonnes relations et d'où viennent aussi Sidibé et Lhéry. « D'autres vont à Clairefontaine, comme Nordin, Ghezali ou Saint-Maximin qui avait été contactés par Paris mais avait préféré venir chez nous » poursuit Fernandez qui a vu passer pas mal de talents sous ses yeux. Mais pas de Saliba. On ne dira pas qu'il a explosé tant son potentiel était évident « Il était grand et il n'y a pas beaucoup de centraux en dessous de 1,85 m, mais il avait aussi déjà cette technique, il était juste dans ses choix ».

« Plus complet » que Kurt Zouma selon Gérard Fernandez

Peut-on le comparer à Zouma ? « Il est plus complet au même âge, Kurt était tout en puissance » avance Fernandez. Aucun des observateurs des matches face à Toulouse, Bordeaux ou Reims ne le contrediront... « Il dégage une grande confiance, ne doute de rien » a commenté Daniel Bravo sur beIN épaté par l'assurance du gamin qui s'est imposé d'entrée devant Dia et Oudin (qu'il a même jonglé) puis Chavarria, à Reims.

Peut-on oser un bémol parce qu'il peut aussi parfois prendre des risques ? « Il a les défauts de ses qualités, de son insouciance » réplique Christophe Chaintreuil. Et Loïc Perrin ne s'y trompe pas, qui déclarait à But après Bordeaux : «  Il est très mûr dans son jeu. On n’a pas l’impression qu’il a 18 ans. Il a tout ce qu’il faut pour jouer au plus haut niveau, que ce soit physiquement, techniquement ». Ce qui ne gâche rien, c'est que son jeune coéquipier est à l'écoute, mais pas seulement. On a ainsi vu les deux hommes en plein échange à Reims et sans tirer sur l'ambulance des absents, on voit un autre Perrin quand il opère avec Saliba dans une défense à trois comme à quatre.

Prolongé jusqu'en 2023, le prodige vert devrait poursuivre sa progression en L1 et à Saint-Etienne, quand d'autres sont allés trop tôt se brûler les ailes ailleurs, sans avoir le dixième de ses qualités, tels Grondin, Péricard ou Medjani. Mais comment lui éviter d'aller se briser les os ou genoux dans des duels trop âpres comme Zouma ? Peut-être sous forme d'un transfert avec prêt à la clé ou un contrat incluant un fort pourcentage pour le joueur en cas de vente en fin de saison ou plus tard. Un parcours européen ne ferait que valoriser le joueur. Et plus important à nos yeux, assurer sa progression. »

Didier Bigard