LOSC – ENQUETE : les dessous de la méthode Luis Campos

Mais qui est vraiment l’architecte portugais des Dogues ? Comment travaille-t-il ? Enquête.

Quel est son parcours ?

S’il est surtout connu pour être un brillant chasseur de tête passé par l’AS Monaco, le FC Porto ou encore le Real Madrid, Luis Campos a eu une vie avant cela… Et ce ne fut pas celle d’un footballeur puisqu’il a raccroché les crampons à 21 ans sans jamais avoir été professionnel. Agé de 52 ans, le natif de Fão a d’abord été un entraîneur modeste. Lancé à 27 ans à l’Uniao de Leiria, il va enchaîner les postes à Esposende, Aves, Leça, Penafiel, Gil Vicente, Vitorial de Setubal, Varzim et Beira-Mar sans jamais parvenir à exploser. Pire, pour avoir fait descendre trois clubs (Varzim, Setubal et Beira-Mar), il hérite du surnom moqueur de « Campa » (« la tombe») auprès des journalistes locaux. En 2005, il cesse définitivement son métier d’entraîneur pour partir un peu dans tous les sens (professeur à l’Université, gestionnaire de restaurant…) avant de trouver la voie où il excelle : celle du scouting.

Quels sont ses réseaux ?

Luis Campos est un intime de Jorge Mendes et peut s’appuyer sur les scouts de la Gestifute pour briller sur les marchés portugais et sud-américains. Mais, s’il est très lié et redevable du plus grand agent du monde (qui a fait de lui ce qu’il est aujourd’hui), ce serait réducteur de faire de Campos l’homme de mains de Mendes. Pour être passé dans beaucoup de clubs et avoir eu plusieurs vies (il a notamment fondé la société Training to Play avec un autre ancien entraîneur Américo Magalhães), l’intéressé a enrichi son carnet d’adresses. Car, en plus de parler plusieurs langues (dont le Français), Campos peut se targuer d’avoir un excellent relationnel et un vrai sens des affaires. « C’est une personne très droite, ouverte d’esprit, qui travaille avec tout le monde. Malgré son départ de Monaco, nous avons gardé le contact », nous confie un agent français avec qui il a travaillé sur le Rocher.

Comment fonctionne-t-il ?

La force de Campos, c’est celle du nombre. S’appuyant sur une stratégie qui a fait ses preuves au FC Porto et dans les pays de l’Est, le chasseur de tête aime recruter massivement. Quite à ne sortir qu’une ou deux pépites d’un recrutement de dix inconnus. « La formation, ce n’est clairement pas son truc. Lui, ce qu’il aime, c’est la formation des autres », lâche un journaliste franco-portugais interrogé sur l’individu. A Lille, ce n’est surement pas du côté de Luchin que le Portugais ira chercher ses stars de demain. Il regardera les locaux, bien sûr. Mais plutôt que de restructurer la formation et la préformation, il va surtout chercher à trouver ailleurs les jeunes joueurs qui seront ses grosses ventes de demain. La politique du résultat rapide en somme. Dans son travail, l’intéressé est très méticuleux. A Lille, on parle d’une première liste de 50 noms pour les premiers recrutements. Dans la pratique, on se rapprochera surement d’une liste d’une centaine de noms de joueurs, classés par poste et renseignés par gamme de prix d’achats.  C’est comme ça qu’il œuvrait pour Vadim Vasilyev à Monaco. Ses employeurs apprécient généralement sa rigueur et la présence de Jorge Mendes à ses côtés pour aider à l’exfiltration vers les grands clubs étrangers.

Pourquoi il a choisi Lille ?

Avant d’opter pour le rôle de conseiller de Gérard Lopez, Luis Campos était annoncé à peu près partout en Europe (Milan AC, Real Madrid, Manchester United, Inter Milan). Il était même rentré en négociations avec l’Olympique de Marseille. Dans ces conditions, le choix de Lille parait surprenant : «Ce qu’il cherchait, c’était une plate-forme d’achats et de ventes de joueurs pour mettre en avant ses compétences. Gérard Lopez a dû lui proposer ce que les grands clubs n’ont pas besoin de faire », croit savoir un observateur avisé de la carrière de Luis Campos. Par ailleurs, avec l’homme d’affaires luxembourgeois, l’ancien Monégasque a obtenu toutes ses conditions. Celles que Jacques-Henri Eyraud ne voulait lui donner au sein de l’OM Champions Project : avoir les pleins pouvoirs sur le sportif et la possibilité de placer ses hommes dans l’organigramme ou sur le banc (les noms d’André Villas-Boas, Marco Silva ou Vitor Pereira circulent). Pour avoir connu une guerre des clans à Monaco avec les dirigeants français du club (Nicolas Holveck en tête), Campos cherchait davantage de quiétude et un club avec un peu de moyens. A Lille, il aura probablement tout cela. Même si quelques têtes comme celles de Jean-Michel Vandamme, conseiller sportif historique de Michel Seydoux, et bien sûr l’entraîneur Frédéric Antonetti, risquent de tomber pour satisfaire à ses plans.

Alexandre CORBOZ