Aujourd'hui en retraite, l'éducateur nous raconte le Gallois du Real Madrid.
« Quand je suis arrivé à Southampton en provenance de Marseille en 2002, Gareth était déjà dans les effectifs du club. Il jouait avec les U13. Moi, j'étais à la charge des U18. On jouait le samedi. Le dimanche matin, j'allais sur les terrains de jeunes de Wellington. Il m'a tout de suite sauté aux yeux. J'ai vu un gamin endurant, plein d'enthousiasme, qui jouait soit ailier soit latéral gauche. En principe, un joueur a soit le volume, soit la vitesse. Lui, il avait les deux. Et puis sa patte gauche”¦ Dès que j'ai pu, je l'ai intégré à mon groupe. Il n'avait que 14 ans.
On a passé deux saisons et demi ensembles avant qu'il rejoigne l'équipe première. Durant cette période, il n'a jamais marqué de buts. Comme quoi, à§a devait àªtre de ma faute ! (Rires) En màªme temps, dans l'équipe, il jouait arrière-gauche et ne tirait pas les coups de pied arràªtés. Il s'y essayait parfois à la fin des entraà®nements. Je pense que c'est à ce moment-là qu'il a affûté ses armes. Dans le football, on a beaucoup d'exemples de joueurs qui débutent en attaque et reculent au fur et à mesure de leur carrière. Moi-màªme, je suis l'un de ceux-là : un attaquant, reconverti milieu et qui a fait défenseur. Gareth, il a fait tout l'inverse : défenseur, puis milieu, puis ailier et màªme attaquant de pointe.
« Pas un leader, une crème »
Humainement, c'était un gamin extraordinaire. Toujours le sourire. Comme tous les jeunes Britanniques que j'ai pu avoir à Southampton, il débordait d'un enthousiasme exacerbé. Il n'était jamais accablé, triste ou désespéré comme nos petits Franà§ais des centres de formation. Gareth était respectueux, à l'écoute des consignes, bien éduqué. Par rapport à ce que j'avais connu à l'OM juste avant, c'était le jour et la nuit. On dit de lui à Madrid qu'il est plus en retrait par rapport au vestiaire, un peu à l'écart. Mais c'était déjà le cas à Southampton. Gareth est naturellement réservé. Cela n'a jamais été un leader. En revanche, c'est vraiment une crème. Ce n'est pas le genre de garà§on à faire des reproches aux autres pour une passe raté. Au contraire, si quelqu'un est en difficulté, il va aller vers lui pour parler. C'est quelqu'un de très généreux, avec un très grand cÅ“ur.
En 2007, nous avons quitté Southampton en màªme temps. Lui a été transféré à Tottenham à 17 ans pour 10 M£ et moi je suis rentré à Lyon où j'ai repris le centre de formation. Quand nos chemins se sont séparés, je suis resté en contact avec ses parents. A un moment donné, il avait màªme été question avec Vincent Duluc (L'Equipe) qu'on nous réunisse Gareth (Bale), Théo (Walcott) et moi pour un reportage sur le derby de Londres. Mais, dès lors qu'ils sont devenus internationaux tous les deux, leurs agents s'en sont màªlés et ont mis leur véto”¦ Aujourd'hui, Gareth, tu ne peux plus le toucher ! Il a des demandes d'interviews par milliers. Cela fait plusieurs années qu'on ne s'est pas reparlé. Je ne veux pas le déranger : il a bien d'autres choses à faire à Madrid que de s'occuper de son petit formateur franà§ais d'il y a dix ans. Mais je pense que si je venais à le recroiser, on se reparlerait avec plaisir. S'il fait un crochet par Lyon ou par Marseille durant l'Euro, peut-àªtre que je reprendrais contact”¦ »
Recueilli par Alexandre CORBOZ
