Omar Da Fonseca (consultant beIN Sports)
Omar Da Fonseca (consultant beIN Sports)Credit Photo - Photo beIN Sports (crédit : Panoramic)
par Alexandre Corboz
INTERVIEW

ASSE - EXCLU Omar Da Fonseca : « A Saint-Etienne, j'ai eu la meilleure idée de ma vie »

Aujourd'hui consultant pour beIN Sport où il s'apprête à commenter la Coupe du Monde, choisi comme voix-off pour FIFA23, Omar Da Fonseca a aussi une petite sensibilité stéphanoise, lui qui a été responsable du recrutement des Verts au début des années 2000. Pour « But ! Saint-Etienne », l'Argentin le plus aimé de France ouvre la boîte à souvenirs.

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But ! Saint-Etienne : Omar, si pour votre chaîne beIN Sports, c'est une chance d'avoir Saint-Etienne en Ligue 2, on peut penser que vous êtes un peu triste de voir l'ASSE à ce niveau cette saison...

Omar Da Fonseca : Totalement ! Quand on connait le potentiel public et les installations de l'ASSE, voir ce club en deuxième division, c'est d'une tristesse sans nom... C'est lamentable même ! Ce qui me désole, c'est qu'un club comme Saint-Etienne n'a jamais pu trouver une identité forte dans son jeu pour perdurer en Ligue 1. En Espagne, on a le Bétis Séville ou l'Athlétic Bilbao... Même avec moins de moyens que les gros, eux ont su créer une dynamique, en s'appuyant sur de vrais critères de sélection dans le recrutement. A Sainté, on a oublié tout ça et ça a conduit à cette descente en Ligue 2. Une descente qui n'est bonne pour personne : ni pour le club, ni pour la région et encore moins pour le foot français.

Y a-t-il quand même des joueurs dans cette équipe de Saint-Etienne d'aujourd'hui qui pourraient provoquer des envolées lyriques « à la Omar Da Fonseca » ?

Non. Je les regarde très peu. Pour vous dire : face à Sochaux, j'ai regardé un bout de la première mi-temps et j'ai éteint... Même si j'étais dirigeant de ce club, je m'en suis un peu détaché. Je n'ai plus une sensibilité directe à l'égard de l'ASSE même si j'aime beaucoup beaucoup beaucoup leur entraîneur Laurent Batlles, que j'ai côtoyé à ses débuts en jeune à Toulouse...

Vous avez été « pichichi de Ligue 2 » durant votre carrière. Que pensez-vous de l'actuel meilleur buteur de Ligue 2, Jean-Philippe Krasso ?

Je ne connais pas son histoire personnelle et moi, j'ai besoin de ça pour parler des gens. Maintenant il se met à marquer des buts, c'est bien. Forcément, il est aujourd'hui plus exposé. On va attendre plus de lui tout le temps. C'est la vie d'un buteur qui veut ça. Est-ce qu'il fera une grande carrière ? Je ne sais pas... J'espère déjà qu'il fera remonter l'équipe en Ligue 1 même si cette saison, ça s'annonce compliqué...

« J'aime les idées de Batlles. Pour moi, le football, ça ne se coure pas, ça se joue »

Vous nous avez parlé de Laurent Batlles. C'est un coach différent, qui prône une certaine idée de jeu avec plus de technicité et un peu moins d'aspect athlétique et d'impact. On présume que c'est quelque chose qui vous plait...

J'aime cette idée. Pour moi, le football, ça ne se coure pas, ça se joue. Depuis de longues années, on est dans une mode de la statistique, de la data. Tout est devenu mesurable, calculable... Et ça, ça me gêne ! Aujourd'hui, on voit beaucoup de joueurs avec seulement deux fonctions : « contrôle », « passe ». Il y a de plus en plus d'athlètes sur les terrains et de moins en moins de footballeurs. Mais qu'est-ce que les gens aiment au final ? Les Messi, Dembélé, Neymar, Ben Yedder ? Des joueurs qui osent, qui créent quelques choses. Tous les coachs qui vont pousser dans le sens d'un retour au jeu, comme Laurent Batlles, sont les bienvenus. Moi, je suis un vieux de la vieille. Dans mon esprit, le dogme sur l'importance des trois points n'existe pas. Quand je regarde un match, quand je vais dans un stade, je veux me faire plaisir en regardant jouer une équipe, apprécier ses prises de risques, son style, ses belles actions...

Vous avez passé plus de trois ans en tant que recruteur de l'ASSE. Quel souvenir gardez-vous de l'expérience ?

Beaucoup de choses. C'était une expérience nouvelle pour moi qu'être dirigeant. Peut-être que je n'avais pas tous les codes quand je suis arrivés. Beaucoup pensent que j'ai travaillé à l'ASSE de 2005 à 2008 mais j'étais là un peu avant, quand le club était encore en Ligue 2. Je suis arrivé en janvier 2004. J'ai vécu un Saint-Etienne assez lointain de ce qu'il est aujourd'hui. Je vivais au centre de formation à L'Etrat, un peu isolé. Je me souviens avoir passé deux Noël avec le gardien et sa femme, des personnes adorables de qui j'ai malheureusement perdu le contact depuis... Dans ma carrière et dans ma vie d'hommes, ça a été une vraie découverte qui m'a servi dans plein de domaine.

« Avec le CA Talleres, on avait un temps d'avance »

Ces années stéphanoises, c'était beaucoup de frustration. On a beaucoup parlé de Javier Pastore, que vous aviez fait venir mais qui n'avait pas été retenu à l'issue de son essai. Avez-vous d'autres regrets ?

A Saint-Etienne, j'ai eu l'une des meilleures idées de ma vie. Dans ma carrière, j'ai fait beaucoup de postes : j'ai été supporter, joueur, agent, manager, recruteur, commentateur. Le seul qui me manque c'est président de club. On m'a sollicité pour ça mais non... A Saint-Etienne, j'ai eu l'idée de racheter le club du Talleres de Cordoba. A l'époque ça ne coûtait rien. On a fait venir à l'essai des joueurs comme Javier Pastore, Ignacio Piatti mais aussi Julio Buffarini, qui a été capitaine de Boca Juniors et international argentin plus tard. Le CA Talleres, c'était une référence de la formation en Argentine. Plus tard, ils ont d'ailleurs sorti Paulo Dybala. On avait la gestion de ce club. J'avais dit aux dirigeants que, dans les trois ans, on sortirait plusieurs bons joueurs. On n'a pas été patient. Je n'ai peut-être pas été assez convaincant...

Vous pensez avoir mal défendu votre idée à l'époque ?

A Saint-Etienne, il y avait beaucoup d'égos et de personnes qui avaient un avis sur tout. Je donnais mon avis mais je ne pouvais rien imposer. Pour chaque sujet, il y avait l'avis des deux présidents, l'avis de Vincent Tuong-Cong, l'avis du directeur du centre de formation... Il n'y avait pas d'harmonie commune. Certains disaient aux présidents : « Pourquoi Talleres et pas un centre de formation en Afrique ? » Au final, il a été décidé au bout d'un an d'arrêter les frais. On aurait pu faire mieux. Ce qui est marrant, c'est qu'aujourd'hui tous les grands clubs cherchent des filiales à l'étranger pour bâtir une galaxie. Même le PSG s'y met en investissant à Braga... On avait un temps d'avance.

Vous avez quand même pu faire venir les Daniel Bilos, Ignacio Piatti, Freddy Guarin... Pensez-vous le club était suffisamment structuré pour accueillir et intégrer des joueurs sud-américains ?

On parle de ces trois-là, de Pastore, de Buffarini mais il y a aussi eu Rodrigo Palacio qui aurait pu débarquer et qui a été plus tard international argentin, idem pour le colombien Giovanni Moreno qui a passé trois mois dans le Forez avant de faire carrière en Asie... Les idées, ce n'est pas ce qu'il manquait et les carrières américaine d'un Piatti ou portugaise et italienne d'un Guarin montrent qu'on ne s'était pas trompé. A Saint-Etienne, il y a une quinzaine d'années, on ne s'occupait pas d'aider les joueurs à trouver leur place. Et je me mets aussi là-dedans : en tant que recruteur, j'étais aussi responsable de ça. Ce n'est pas une critique : le football était très différent à l'époque, il n'y avait pas tout le staff d'aujourd'hui. Et comme on n'était pas tous sur la même longueur d'ondes au club, ça n'a pas aidé ces joueurs-là. Maintenant je ne regrette rien. Cela fait partie de mon passé et cela reste un très joli vécu.

A l'époque, vous êtiez très proche de Bernard Caïazzo et moins de Roland Romeyer. Quel regard portez-vous sur la défiance du Peuple vert à l'égard des deux présidents ?

Cela va faire une quinzaine d'années que je n'ai plus de contact avec Monsieur Caïazzo et Monsieur Romeyer. Depuis, j'ai dû les croiser une fois dans un stade. Je me garderais bien de donner un jugement. N'ayant pas tous les tenants et les aboutissants de ce qu'ils ont essayé avec les groupes de supporters, je ne permettrais pas de donner un avis. Sportivement, la situation est ce qu'elle est. Chercher les causes et les coupables, ce n'est pas du tout mon rôle. Tout ce que je souhaite aujourd'hui, c'est que Saint-Etienne puisse remonter en Ligue 1... Et de préférence de mon vivant !

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Aujourd'hui consultant pour beIN Sport où il s'apprête à commenter la Coupe du Monde, choisi comme voix-off pour FIFA23, Omar Da Fonseca a aussi une petite sensibilité stéphanoise, lui qui a été responsable du recrutement des Verts au début des années 2000. Pour « But ! Saint-Etienne », l'Argentin le plus aimé de France ouvre la boîte à souvenirs.

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